Joseph Moog en récital à l’Auditorium du Louvre – Un premier récital parisien remarqué – Compte-rendu
En janvier 2015, Joseph Moog (né en 1987) faisait ses débuts parisiens à Gaveau dans le Concerto « L’Egyptien » de Saint-Saëns, avec l’Orchestre Lamoureux dirigé par Fayçal Karoui.
Une très belle prestation (1) qui rendait d’autant plus impatient de retrouver l'artiste en récital sur une scène de la capitale. Le découvreur Auditorium du Louvre aura pris l'initiative de programmer le jeune pianiste allemand pour un rendez-vous suivi par un public très nombreux. Un regret tout d’abord, mais d'importance, avant d’en venir aux qualités de Moog : quel dommage que beaucoup d’auditeurs l'aient entendu pour la première fois sur le piano trop mat, pour ne pas dire éteint, de l’Auditorium ; il ne rendait guère justice à sa palette sonore. Une salle qui joue un rôle tremplin aussi essentiel pour les nouveaux interprètes se devrait de leur offrir un instrument d'une tout autre qualité. Trois auteurs populaires, Beethoven, Chopin et Tchaïkovski, figurent au programme d’un récital qui n’a toutefois rien de « facile » dans la mesure où il rassemble les Variations Eroica, la Sonate op. 58 et la Grande Sonate en sol majeur op. 37. Dernier important cycle de variations du compositeur allemand avant les Diabelli, les Eroica, par leur densité, confrontent l’interprète à un redoutable défi – leur rareté en concert n’a rien d’un hasard...
Moog est l’homme de la situation : avec autorité et sensibilité, il s’approprie le laboratoire d’idées musicales que constitue l’Opus 35 et en maîtrise le foisonnement et les subtils équilibres jusqu’à la fugue conclusive, remarquablement conduite. Le rejet de tout effet de manche, le profond sens harmonique de l'interprète font autant merveille dans la 3ème Sonate en si mineur dont il défend une approche sobre et finalement assez classique. C’est bien dans la lignée de Bach que se situe un Chopin dont la polyphonie est continûment mise en valeur. Visiblement attaché à la Grande Sonate de Tchaïkovski (dont il a signé un bel enregistrement chez Onyx), Moog en livre une interprétation maîtrisée et très allante. Il n’y manque qu’un peu de liberté recréatrice, de démesure – et un instrument plus généreux en couleurs - pour transcender (à la façon d’un Alexander Paley) une partition qui n’est pas l’opus le plus impérissable du piano russe – loin de là …
Les moyens pianistiques et l’intelligence musicale de l’artiste trouveraient à autrement mieux s’employer chez Liapounov ou, plus encore, Medtner. En bis, la fameuse Pastorale de Scarlatti/Tausig est suivie du volubile arrangement d’En avril à Paris de Trenet par Weissenberg. Un sympathique clin d’œil à une ville où l’on espère revoir bientôt le pianiste allemand. Allez, un peu de curiosité et d’audace Messieurs les programmateurs de saisons symphoniques !
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